FONCTION de l'oreille interne
Le système vestibulaire joue un rôle clef dans la stabilisation de l’image du monde visuel pendant les mouvements de la tête et dans la stabilisation du corps et de la tête dans l’espace. Il s’agit d’un système rapide qui met en jeu deux principaux types de réflexes : le réflexe vestibulo-oculaire et le réflexe vestibulo-spinal.
LE SYSTEME VESTIBULAIRE
Au niveau périphérique, les récepteurs canalaires détectent l’accélération angulaire de la tête dans l’espace et les récepteurs otolithiques détectent l’accélération linéaire et l’inclinaison de la tête par rapport à la gravité (Blanks & Precht, 1976; Graybiel, 1963). Leur rôle est d’informer en permanence les centres intégrateurs de la position et des mouvements du corps et de la tête dans l’espace.
Les informations sensorielles sont transmises par les neurones vestibulaires primaires, dont le soma se situe dans le ganglion de Scalpa, jusqu’aux noyaux vestibulaires.
Au niveau central, on trouve les noyaux vestibulaires situés dans le tronc cérébral et les projections des neurones vestibulaires secondaires vers la moelle épinière, le cervelet, les noyaux oculomoteurs, le thalamus et le cortex). Ces noyaux vestibulaires sont de véritables centres d’intégration sensorimotrice recevant des informations vestibulaires, somesthésiques et visuelles (D. W. Schwarz, Rubin, Tomlinson, Milne, & Fredrickson, 1975).
Trois voies de projection des neurones vestibulaires secondaires
Les voies vestibulo-oculaires permettent la stabilisation de l’image du monde visuel sur la rétine lors des mouvements de la tête via le réflexe vestibulo-oculaire (RVO). Les voies vestibulo-spinales permettent la stabilisation de la tête par le réflexe vestibulo-nucal (RVN) et du corps dans l’espace grâce au réflexe vestibulo-spinal (RVS). Les voies vestibulo-thalamo-corticales sont responsables de la perception sensorielle à l’origine de la perception d’un vertige rotatoire.
Les neurones vestibulaires secondaires se projettent sur les motoneurones spinaux ce qui permet la stabilisation de la tête par le réflexe vestibulo-nucal (RVN) et du corps dans l’espace grâce au réflexe vestibulo-spinal (RVS). Les RVN et RVS interviennent dans le contrôle de la posture ainsi que dans les réactions d’adaptation et de rééquilibration. Les neurones vestibulaires sont également connectés aux noyaux extra-oculomoteurs (III, IV, VI, ceci permet la stabilisation de l’image du monde visuel sur la rétine lors des mouvements de la tête. C’est le réflexe vestibulo-oculaire (RVO). Enfin, d’autres voies sont responsables de la perception sensorielle à l’origine de la sensation d’un vertige rotatoire : ce sont les voies vestibulo-thalamo-corticales et sous-corticales (Blum & Gilman, 1979; T Brandt & Dieterich, 1999).
Le réflexe vestibulo-oculaire (RVO)
Les voies vestibulo-oculaires sont le support du réflexe vestibulo-oculaire (RVO). Le RVO est un arc reflexe rapide à trois neurones (Baker et al., 1981) d’une latence de 5 à 7 ms (Huterer & Cullen, 2002; Minor, Lasker, Backous, & Hullar, 1999). Son but est de maintenir la stabilité de l’image du monde visuel sur la rétine lors de mouvement de la tête. Pour cela, le RVO va initier un mouvement rapide et compensateur de l’œil (dans la même direction mais de sens opposé à la rotation de la tête). Normalement, quand la tête bouge dans une direction, les yeux bougent dans la direction opposée avec une vitesse identique. Par exemple, lors d’un mouvement de tête vers la gauche, les CSH antérieurs sont excités. L’activation des neurones primaires des CSC horizontaux entraine une rotation des deux yeux dans la direction opposée au mouvement angulaire de la tête, c’est à dire vers la droite.
Le système vestibulaire périphérique comporte deux types de cellules ciliées : les cellules de type I et les cellules de type II. Les cellules ciliées de type I sont piriformes avec une jonction neuronale en forme de calice. Une terminaison nerveuse en calice peut innerver une à quatre cellules ciliées. Les cellules ciliées de type II sont cylindriques et ont de multiples jonctions neuronales avec des terminaisons nerveuses en forme de bouton. La répartition de ces cellules ciliées sensorielles au sein de la crête ampullaire des CSC est particulière.
Orientation des cils à la surface des cellules ciliées de la crête ampullaire
Un déplacement de l’endolymphe entraine un mouvement des stéréocils. La déflection des stéréocils vers le kinocil entraine une excitation (dépolarisation) alors que la déflection dans le sens opposé entraine une dysfacilitation (hyperpolarisation).
Les cellules ciliées de type I et de type II sont associés à des neurones vestibulaires primaires irréguliers et réguliers, respectivement. Cette classification, régulière et irrégulière, fait référence à la régularité de décharge des potentiels d’action de ces neurones. Elle est déterminée par l’intervalle de temps entre deux potentiels d’action. L’information est transmise par les neurones réguliers ou irréguliers selon la stimulation (fréquence et accélération des mouvements de la tête). En général, les neurones irréguliers sont de grand diamètre, plus sensibles aux rotations de la tête avec une forte accélération car ils ont un gain élevé des réponses. Les neurones réguliers au contraire, sont de plus petit diamètre, ont une vitesse de conduction plus élevée et un gain des réponses moindre. Ils fournissent un signal proportionnel à la vitesse de la tête.
Les deux types de neurones vestibulaires primaires ont une activité basale (à l’état de repos) comprise entre 70 à 100 potentiels d’action par seconde (J. M. Goldberg, 2000; Lysakowski, Minor, Fernández, & Goldberg, 1995). Cette activité de décharge basale élevée permet, lors d’une stimulation, d’activer ou de dysfaciliter l’activité neuronale. Les corps cellulaires des neurones vestibulaires primaires sont situés dans les divisions supérieure et inférieure du ganglion de Scarpa qui se situe au sein du canal auditif interne. Les branches du nerf vestibulaire traversent le méat acoustique interne pour se projeter sur les neurones des noyaux vestibulaires centraux de part et d’autre du IVe ventricule dans la partie dorsale du tronc cérébral.
Il existe cinq noyaux vestibulaires (Victor Joseph Wilson & Jones, 1979): médian, supérieur, inférieur, latéral et Y. Les neurones vestibulaires primaires de la branche supérieure se projettent dans les noyaux vestibulaires supérieur et médial. Les neurones vestibulaires primaires de la branche inférieure du nerf vestibulaire se projettent dans les noyaux vestibulaires médial, latéral, ou inférieur.
Noyaux vestibulaires centraux situés dans le tronc cérébral
Les noyaux vestibulaires centraux se situent de part et d’autre du IVe ventricule dans la partie dorsale du tronc cérébral. Ils sont au nombre de cinq: supérieur, latéral, médian, inférieur et Y. Les voies vestibulo-oculaires se projettent sur les noyaux oculomoteurs III, trochléaires IV, et abducens VI via le faisceau longitudinal médian. Les voies vestibulo-spinales sont organisées en trois faisceaux: latéral, médian et caudal.
Chacun des six muscles extra-oculaires (muscles droit supérieur, droit inférieur, latéral, droit interne, petit oblique et grand oblique) est innervé par l’un des trois noyaux oculomoteur (III), trochléaire (IV) ou abducens (VI) (3) (Büttner-Ennever, Horn, Scherberger, & D’Ascanio, 2001; Schubert & Minor, 2004, p. 2). Le noyau oculomoteur III innerve le muscle droit inférieur, droit interne, petit oblique ipsilatéral, et le muscle droit supérieur controlatéral. Le noyau trochléaire IV innerve le muscle grand oblique controlatéral. Le noyau abducens VI innerve le muscle droit latéral ipsilatéral, et le muscle droit interne controlatéral.
Les voies vestibulo-oculaires comprennent un neurone vestibulaire primaire qui transmet les informations sensorielles provenant des cellules ciliées vestibulaires, un neurone vestibulaire secondaire qui permet l’intégration des différentes informations sensorielles au niveau des noyaux vestibulaires et un motoneurone oculaire qui reçoit l’ordre moteur qui se projette sur les fibres musculaires oculaires.
Pendant les rotations de la tête dans le plan horizontal par exemple, la crête ampullaire du CSC horizontal ipsilatéral à la rotation va être activée. Les neurones vestibulaires primaires provenant du CSC horizontal vont se projeter sur les noyaux vestibulaires ipsilatéraux médian et latéral. Une partie des neurones vestibulaires secondaires va décusser pour innerver le noyau abducens controlatéral (noyau VI). Les motoneurones du noyau abducens vont ensuite innerver la jonction neuromusculaire du muscle droit latéral. Une autre partie des neurones vestibulaires secondaires va innerver directement le noyau oculomoteur ipsilatéral (noyau III). Les motoneurones du noyau oculomoteur vont innerver le muscle droit médian. Enfin une autre partie des neurones vestibulaires secondaires va se projeter sur le noyau abducens ipsilatéral. Depuis les noyaux abducens, les neurones cheminent dans le faisceau longitudinal médian pour se projeter sur les noyaux oculomoteurs controlatéraux puis sur les muscles droits médians. (Baker, Evinger, & McCrea, 1981; A Berthoz, Droulez, Vidal, & Yoshida, 1989; Dieringer, Pantle, Reichenberger, & Straka, 1996). Des patterns similaires existent pour les canaux antérieurs et postérieurs. La majorité des voies vestibulo-oculaires sont issues des noyaux vestibulaires supérieur et médian mais il n’y a pas d’organisation en faisceaux comme pour les voies vestibulo-spinales.
Le réflexe vestibulo-oculaire se mesure grâce à deux paramètres : le gain et la phase. Le gain du RVO exprime la relation entre le mouvement de la tête et celui de l’œil. Le gain du RVO est la vitesse de l’œil divisée par la vitesse de la tête. Un gain normal est égal à -1. La phase du RVO représente la relation temporelle entre la position de l’œil et celle de la tête. Idéalement, la position de l’œil devrait être, pour un temps donné, égale à l’opposé de la position de la tête. Par convention, ceci décrit une phase à zéro.
Le réflexe vestibulo-spinal (RVS)
Les voies vestibulo-spinales sont le support de deux réflexes : le réflexe vestibulo-spinal (RVS) et le réflexe vestibulo-nucal (RVN).
Le réflexe vestibulo-spinal (RVS)
Le RVS permet le maintien de la posture et du centre de gravité du corps sur un support. Lors d’un mouvement de la tête, les membres inférieurs et supérieurs ipsilatéraux à la direction de l’accélération sont étendus alors que ceux controlatéraux sont contractés. Il joue un rôle majeur dans le maintien de l’équilibre en position debout et lors de la marche. Ce réflexe est supporté par les voies vestibulo-spinales latérales.
Le réflexe vestibulo-nucal (RVN)
Le RVN est un réflexe de stabilisation qui sert à maintenir la tête dans une position où le regard est horizontal (relativement à la gravité) et ce indépendamment des mouvements du tronc. Par exemple, un individu faisant de l’escalade, déplace son poids vers le côté. Ces organes otolithiques détecte ce changement gravitationnel et entraine un mouvement de tête opposé à la direction dans le but de maintenir le regard droit. Ce réflexe semble être lié aux organes otolithiques et au tractus vestibulo-spinal médian.
EQUILIBRE
L’équilibre chez l’Homme est une fonction complexe et indispensable au maintien de la position érigée bipodale. Pour assurer un contrôle de la posture, plusieurs entrées sensorielles sont mises en jeu : les entrées visuelles, les entrées proprioceptives et somesthésiques ainsi que les entrées vestibulaires
Lors du vieillissement, ces entrées peuvent être altérées ce qui explique le risque accru de chute chez les séniors. Le système vestibulaire vestibule joue un rôle clé dans la stabilisation du regard et le contrôle de la posture.
Entrées sensorielles impliquées dans le contrôle postural
Les entrées vestibulaires, visuelles, proprioceptives jouent un rôle fondamental dans la stabilisation du regard et de la posture.
Conclusion
Le système vestibulaire permet de fournir avec précision une représentation des mouvements de la tête et du corps dans les trois dimensions de l’espace. Il doit aussi générer des réponses motrices permettant de s’adapter à ces mouvements. Grâce aux réflexes vestibulo-oculaire et vestibulo-spinal, le système vestibulaire assure la stabilisation du regard et de la posture lors des mouvements de la tête et du corps. De plus, le système vestibulaire permet l’intégration et la perception de la position du corps dans l’espace grâce aux voies neuronales centrales qui se projettent sur le cortex, le cervelet et le thalamus.